Massif corallien
Portrait d'Edith Wharton
Cet après-midi, avec ma grand-mère maternelle, j'ai exploré un massif de souvenirs calcifiés, socle où par force les miens sont bâtis. Branches de corail folles et fragiles mais qui ensemble forment de redoutables remparts, protecteurs d'un côté, menaçants de l'autre.
Je compulse des albums de photos que je n'avais jamais vues et je découvre des images, à tous les sens du terme, tenues dans l'ombre jusque-là. Je pense au roman d'Edith Wharton La récompense d'une mère. Je comprends aussi pourquoi j'ai toujours été fascinée par l'univers de cet écrivain.
Ce matin, j'ai choisi des tomates pour leur couleur extraordinaire, un vert rouillé et verni, des tomates de pays , certes, mais de serre ; je pense, à tort, que la saveur ne sera pas à la hauteur de la couleur. Comme j'ai besoin de ressasser, de méditer et que la cuisine est pour moi le moyen par excellence de le faire, je prévois d'utiliser mes tomates pour en faire une tarte tatin : exactement comme la fameuse tarte des soeurs Tatin, mais les tomates remplacent les pommes, et il y a de l'huile d'olive et du thym...
Avant j'irai explorer les talus et les bois qui entourent le lac de la Bonde avec mon appareil-photo, une pensée pour mon grand-père qui visiblement aimait faire ça aussi (jusqu'à aujourd'hui je l'ignorais), et après, je mettrai en marche la machine à écrire : je m'enfouirai dans la vapeur et la buée des mots, sans me presser.
Je décide aussi de commander l'intégrale des journaux de Virginia Woolf dont j'ai entendu lire des fragments à la radio en revenant de la Drôme. Il m'a semblé reconnaître la voix de Maud Reyer, mais sur le site de France Culture, pas d'information à ce sujet. La voix était magnifique, profonde et mûre, un fruit, et servait admirablement les mots et les phrases de Virginia Woolf.